Le 22 juin, l’agora d’Orange Campus était au grand complet pour accueillir pour sa première participation à une Convention ACSED, Brigitte Sabotier, Directrice des Ressources Humaines d’Orange France venue partager sa vision « Ressources Humaines » dans le contexte de transformation permanente que nous vivons au quotidien et échanger sur les évolutions majeures en cours à l’ère de la révolution digitale qui touche les entreprises, les salariés, les clients, la société civile dans son entièreté.
Après une rapide présentation où Brigitte Sabotier a évoqué sa carrière principalement dans le domaine RH, elle a rappelé les enjeux d’adaptation pour Orange et en particulier Orange France forte de ses 70 000 salariés.
L’enjeu principal est de construire le socle de compétences qu’il nous faudra en 2025. Ce qui se joue aujourd’hui pour nous et pour nos compétiteurs, c’est de rester en tête dans cette « course des compétences » pour bien nous préparer aux métiers de demain. Nos valeurs d’écoute, de bienveillance, de solidarité, le droit à l’erreur, sont tout autant importantes à acquérir voire à développer que la maîtrise de nos compétences techniques – notre ADN – qui font d’Orange le leader incontesté que nous savons. Nos postures comme la confiance, l’empathie Client, l’ouverture d’esprit doivent nous servir à faire la
différence face à ce monde en perpétuel mouvement.
Après ces propos introductifs, Brigitte Sabotier s’est prêtée au jeu des questions/ réponses.
ACSED : le digital, un enjeu de toute entreprise, comment faciliter son appropriation et éviter des disparités d’appropriation ?
Brigitte Sabotier : le digital est une formidable opportunité pour aller vers plus de valeur, il modifie cependant nos usages mais également nos métiers et pratiques professionnelles. Aussi il est essentiel d’accompagner l’ensemble de nos équipes sur les évolutions qu’il induit et veiller à ne laisser personne au bord du chemin. Le digital, dans la relation client, monte en puissance et devient le canal préféré des clients pour de nombreux services. Cette progression usages se voit notamment dans l’appétence aux réseaux sociaux.
ACSED : l’accord sur la reconnaissance des compétences et des qualifications : quel bilan depuis sa signature en 2017 ?
BS : cet accord est fondateur. Il est clé pour l’entreprise dans la nouvelle approche recherchée : mettre en priorité l’accent sur les compétences de demain et non plus sur les activités et le poste de travail comme nous le vivons depuis toujours. C’est une nouvelle logique et pour ce faire, la mise à jour du référentiel métier a été engagée. Passer de 400 métiers à une centaine n’est pas aisé et reste un exercice qui demande du temps. Or les métiers évoluent de plus en plus vite. L’enjeu est donc de construire des repères métier dans lesquels les salariés peuvent se reconnaître aujourd’hui et demain. L’intention de cet accord est essentielle mais sa mise en œuvre
opérationnelle doit faire l’objet d’une attention toute particulière. Ce qu’il faut souligner également, c’est l’évolution de la logique de recrutement qui s’affranchit de la notion de grade que nous connaissons bien et qui a prévalu depuis toujours. Ce qui est maintenant mis en valeur, ce sont les compétences.
ACSED : quels sont les métiers qui vont disparaitre, ceux qui vont apparaitre ?
BS : Il est important de préciser que le but de l’accord n’est pas de faire disparaitre des métiers, juste de les regrouper sur la base de socles de compétences propres à de nombreux métiers.
ACSED : dans cette évolution, comment les managers sont-ils accompagnés ?
BS : Nous avons lancé un programme d’accompagnement à la mise en œuvre de l’accord avec des ateliers destinés aux managers pour les aider à évaluer les compétences de leurs collaborateurs et à pratiquer le feed-back. Plus globalement nous avons un programme d’accompagnement managérial intitulé Manager2020 sur lequel nous avons des retours très positifs. Nous complétons ces approches en encourageant le co-développement entre pairs et le partage de bonnes pratiques. Le rôle du manager évolue et va être complété par de nouveaux rôles d’accompagnement pour garantir la proximité et le développement des collaborateurs. Par exemple, le rôle de coach agile est une autre manière d’accompagner la transformation et la montée en compétences sur les nouvelles formes de travail.
ACSED : quelles recettes pour aller plus vite ?
BS : Il faut accepter de se donner du temps, le temps de l’appropriation. Il faut se doter d’espaces d’échange. Nous travaillons actuellement sur notre culture managériale. Nous sommes allés rencontrer les managers dans toutes les DO et nous avons engagé un travail avec des Milléniales pour connaître leurs attentes. Nous envisageons dès cette rentrée de travailler avec les réseaux de managers pour diffuser ces travaux et construire collectivement ces nouveaux repères pour la communauté managériale d’Orange France !
ACSED : des territoires très étendus, des rapprochements d’unités notamment des UIs. Comment concilier management de proximité et distance ?
BS : la proximité est dans notre ADN. Pour la communauté managériale et pour la fonction RH qui s’attache chaque jour à agir au plus près des besoins des équipes. Elle est une valeur essentielle. Dans le même temps nos évolutions démographiques et notre choix de rester présents sur l’ensemble des territoires fait que nos équipes sont parfois dispersées et que nos managers et nos RH doivent de plus en plus se déplacer pour garantir la proximité. Nous devons imaginer et repenser des modes de fonctionnement qui permettront d’assurer une proximité pour tous au quotidien tout en préservant le temps manager et RH. Certaines entités ont par exemple nommé des « managers et/ou de DRH de site » qui garantissent la proximité et assurent le suivi des salariés de l’ensemble d’un site quel que soit son
entité de rattachement, gommant ainsi les « silos ». Nous envisageons d’autres pistes pour renforcer la proximité. Nous souhaitons co-construire cela avec nos managers et nos RH.
ASCED : quid des nouvelles méthodes de travail à Orange France ?
BS : nous travaillons beaucoup sur l’agilité que nous souhaitons développer pour tous. Sur le mode projet, nous avons engagé un programme de développement de compétences principalement centré sur la
méthode SAFE de manière à pouvoir développer le nombre de projets produits en mode agile de bout en bout.
Plus largement et pour l’ensemble des collaborateurs, nous avons engagé un programme de développement de la culture agile pour développer l’initiative, le test & learn. Nous avons par exemple des sessions en cours de Design Thinking avec Faber Novell.
Pour la fonction RH, la filière a conçu un programme appelé AGILITOUR avec des relais formés sur l’agilité qui vont qui vont sur le terrain à la rencontre de leurs collègues pour leur présenter les principes de l’agilité et les aider à résoudre des cas concrets en mode agile.
ACSED : quelles relations entretenons-nous avec les start-up ?
BS : nous travaillons avec les start-up sur différents projets et proposons à nos salariés des immersions dans certaines d’entre elles. Nous avons quelques partenariats en réflexion ou en cours de construction, par exemple avec une start-up qui propose des formations en ligne sur les compétences de demain.
ACSED : comment donner les clés aux managers pour recenser les compétences, notamment celles acquises sur des postes précédents, voire en dehors de l’entreprise ?
BS : dans l’accord sur la reconnaissance des compétences et des qualifications c’est bien pris en compte et précisé. Nous travaillons sur un module de formation spécifique et un portail sur l’évaluation des compétences.
ACSED : si un manager n’est pas aux attendus en terme de posture, quelles actions engagez-vous ?
BS : je crois beaucoup à l’exemplarité. Si nous sommes alertés lorsque des managers n’incarnent pas les valeurs que nous défendons, nous prenons en charge l’analyse des situations et nous donnons les suites qui conviennent. C’est un devoir de l’entreprise. Nous accordons à ces situations toute l’attention qu’elles exigent.
ACSED : comment faire évoluer les EI, sur des outils d’hier ?
BS : La difficulté de l’entretien individuel tel qu’il existe aujourd’hui, c’est qu’il embarque aussi bien un échange sur les compétences, sur la performance mais aussi sur le projet professionnel. Nous avons besoin de faire évoluer la démarche pour renforcer l’échange sur les compétences, le rendre plus fréquent et développer la pratique du feedback. Pour cela, nous devons accompagner nos managers. Des ateliers à leur attention sont en cours dans plusieurs DO (Direction Orange) et DN (Direction nationale).
ACSED : quid des mobilités, de la fluidité dont on parle très souvent ?
BS : Dans un monde en mouvement avec des besoins de compétences en perpétuelle évolution, la fluidité est essentielle. Nous travaillons au développement des parcours dans les bassins d’emploi. Nous devons améliorer notre capacité à anticiper l’évolution des activités sur chaque territoire et sur les compétences qu’elle requiert. C’est la condition nécessaire pour construire des parcours professionnels en lien avec les besoins de l’entreprise avec de facto, une politique d’accompagnement localisée, puisque centrée sur les besoins spécifiques de chaque géographie.
ACSED : comment allez-vous rendre attractifs certains bassins d’emploi ?
BS : nous allons proposer des solutions attractives pour faciliter la mobilité sur certains bassins notamment en tenant mieux compte des impacts familiaux par le biais de dispositifs d’accompagnements spécifiques. Il y a parfois aussi tout simplement un besoin de mieux faire connaître ces bassins et de faire savoir qu’ils recrutent.
ACSED : quels métiers seront ceux de demain et comment se fera la transmission des savoirs d’aujourd’hui ?
BS : comme je l’ai déjà précisé, nous passerons de près de 400 métiers existants, à un peu plus de 100 métiers, ce sont de grands enjeux et des défis à relever avec un maximum d’anticipation.
Cette transmission du savoir par une montée en compétences ne sera possible qu’en associant plusieurs composantes à différents niveaux :
– un investissement fort en développement de compétences qui permettra la diffusion de cette nouvelle culture avec une montée en puissance des « soft skills »,
– un appui managérial avec une implication au plus près des équipes. Les managers jouent un rôle essentiel dans l’entreprise de partage, de transmission dans la mise en œuvre des transformations. Rester à leur écoute, les rassurer si besoin, c’est précisément un facteur déterminant dans la réussite du changement que nous souhaitons conduire.
Les changements que nous vivons ne sont pas seulement ceux de notre entreprise mais de la société toute entière. Les évolutions induites par le digital sont sociétales. Il faut les accompagner avec bienveillance et au rythme de chacun. Au-delà des actions que nous avons engagées pour nos salariés, nous avons aussi mobilisé des moyens en créant notamment par le biais de notre Fondation Orange des maisons digitales qui permettent de développer des compétences de base sur les usages digitaux pour des personnes en difficulté.
Enfin, sur les métiers de demain pour Orange, on peut évidemment souligner l’importance des compétences dans le domaine de la sécurité. Renforcer la confiance numérique par la sécurité des données est un enjeu clé pour Orange.
En conclusion de son intervention, Brigitte Sabotier a tenu à revenir sur le sens donné à cette transformation que nous vivons.
« Dans notre entreprise qui a choisi de se différencier par l’excellence de sa relation client qu’elle veut incomparable, l’enjeu des compétences est fondamental. Plus que jamais, les femmes et les hommes d’Orange sont notre plus grande richesse. L’adaptation des compétences dans un marché en forte évolution doit être notre priorité. Nous avons des atouts sur lesquels nous appuyer pour relever ce défi : des managers engagés qui au quotidien donnent du sens et accompagnent leurs équipes. Nous devons également continuer à nourrir un dialogue social constructif et continu pour que toutes les forces de l’entreprise contribuent à accompagner ces changements dans les meilleures conditions ».